Programmes 2008 du primaire – Français

Le texte commun aux trois sections comporte pour le français les chapitres suivants :
– s’approprier le langage
– découvrir l’écrit

Il est complété par le tableau synoptique des progressions de chacune des trois sections.

S’approprier le langage

Ce chapitre est consacré exclusivement à l’acquisition du langage oral.
Nous ne sommes pas compétents pour entrer dans le détail des propositions.
Nous apprécions les progressions par année.
Nous approuvons l’exigence de séquences spécifiques d’acquisition du vocabulaire et d’activités régulières de classification, de mémorisation de mots (p.12), de même que l’exigence d’écouter en silence des textes lus par le maître (p.29).
Nous souhaitons que le programme soit assorti d’un lexique des mots qui devraient être connus, compris, et pour certains couramment utilisés, par les élèves en fin de maternelle – ceci à l’intention particulière des enfants présentant un déficit d’origine culturelle.

Découvrir l’écrit

Pour la petite et moyenne section, l’essentiel paraît être l’initiation orale au langage écrit, la discrimination des sons, l’articulation, les exercices de dessin préalable à la graphie.
Nous désapprouvons la proposition « Ecrire son nom en majuscules d’imprimerie… »(p.30) . C’est de peu d’importance, et cela fait plaisir aux parents  comme aux enfants. Mais c’est du dessin global, et, à ce titre, compte tenu des pratiques à présent générales en maternelle, nous estimons cette mention dangereuse.

Grande section

Se familiariser avec l’écrit (p.30)
Le paragraphe relatif aux supports du texte écrit nous semble inutile ; nous y reviendrons plus loin.
Nous constatons une ambiguïté dangereuse entre :
– l’expression encadrée « produire un énoncé oral dans une forme adaptée pour qu’il puisse être écrit » qui signifie « être capable de s’exprimer dans la forme du langage écrit » qui n’implique pas que l’écrit soit montré aux élèves.
– le paragraphe « contribuer à l’écriture de textes » qui fait état de « traces » donc de l’écrit que certains maîtres seront tentés de montrer à des enfants qui ne savent pas déchiffrer les mots (approche globale)
Se préparer à apprendre à lire et à écrire (p. 30)
Autant cette expression est compréhensible pour les petite et moyenne sections, pour la grande section elle exprime que l’on ne commence pas à apprendre à lire et à écrire dans cette section, prescription minimaliste que nous désapprouvons.
Pas d’observation particulière sur la discrimination des sons et l’articulation.
« Mettre en relation les sons et les lettres » pour une vingtaine de lettres dont c dur et g dur plus ch. Apparemment il s’agit d’apprendre les sons de chaque lettre isolée. Immédiatement après, écrire la lettre en cursive.
Puis « sous la conduite de l’enseignant, écrire en cursive de petits mots simples dont les correspondances entre lettres et sons ont été étudiées ». Faut-il comprendre qu’on revient ici aux syllabes composées d’une consonne et d’une voyelle (sauf ce ci ge gi) ?
Tout cela semble en définitive plus compliqué que la méthode alphabétique classique. Il est important que les exercices proposés aux enfants reposent sur du sens : tout ce qui est trop axé sur la phonétique ou qui conduit à jouer avec les mots et les phrases sans objectif de sens risque de donner aux enfants de fausses représentations et habitudes, qui les empêcheront de s’intéresser au sens lors de leurs premières lectures. La méthode alphabétique ne court pas ce risque car la succession des étapes permet d’explorer progressivement le principe alphabétique et de connaître toutes ses règles, en s’appuyant sur des mots connus par l’élève. Il n’y a aucun intérêt à écrire ce que l’on n’est pas capable de lire : si à ce niveau l’enfant n’apprend pas à lire, il conviendra d’améliorer sa tenue du crayon sur des frises à réaliser, le plus éloigné possible des combinaisons de lettres de l’alphabet qui pour le moment n’ont aucun sens pour lui.
Quelques observations.
« Comprendre le principe alphabétique … une lettre transcrit un son ».
La définition est très approximative (voir ch). D’autre part, c’est après avoir appris le plupart des associations phonèmes-graphèmes que l’élève peut  « comprendre » qu’il existe des associations régulières et d’autres qui sont purement conventionnelles (ph ou ch de christian, lettres muettes, etc…). La compréhension du principe alphabétique ne peut s’obtenir qu’en apprenant à lire par la méthode alphabétique.
« Reconnaître la plupart des lettres »  Qu’est-ce que cela signifie ? Il n’y a pas grand intérêt à faire apprendre les lettres avant d’apprendre à lire et à écrire. Apprendre d’un bloc 26 signes conventionnels sans avoir la possibilité de les utiliser dans des mots qui ont du sens est difficile. Si les enfants en retiennent facilement quelques unes, tant mieux, mais cela ne devrait pas être un objectif à atteindre.
« Ecrire de mémoire son prénom en écriture cursive »(p.30) : non, c’est du (dessin) global à ce stade.

Conclusion sur l’enseignement du français en maternelle

On note un progrès indiscutable concernant l’enseignement, et sa progressivité, du langage parlé, de la prononciation, de la discrimination des sons, de la familiarisation orale avec la langue écrite, du préapprentissage de l’écriture.

par exemple : « écrire en contrôlant la tenue de l’instrument et la position de la page » exercice qui semble avoir largement disparu.

Par contre, pour le début de la lecture-écriture, les propositions sont peu compréhensibles et, à notre avis, très en deçà des capacités de l’élève moyen. La rédaction semble surtout traduire la volonté de se distinguer de la méthode alphabétique, ou d’établir un compromis avec le départ global.
Certes, l’exigence de l’étude des lettres devrait interdire le départ global jusqu’à présent couramment pratiqué en maternelle. mais par ailleurs, les expression choisies rappellent systématiquement la pédagogie constructiviste qui a pour effet d’engendre le désordre dans l’esprit des enfants à l’opposé de la méthode alphabétique explicite et progressive.

Quelques exemples :
• « Les enfants découvrent les usages sociaux de l’écrit en comparant les supports les plus fréquents… etc…; » (p.13). On a l’impression que les enfants construisent une science avec ses classifications et nomenclatures, sans oublier les « fonctions » et les « usages sociaux » (!) alors qu’il s’agit simplement de vocabulaire.
Découvre, découverte, peuvent être compris comme des banalités : le maître enseigne des choses que l’enfant ignore, et que par conséquent celui-ci découvre (s’il suit avec attention…) Mais en 2008, ces termes sont à bannir, à cause de la référence au constructivisme dont un des adeptes comparait naguère les enfants à de modernes Champollion.
•  « En manipulant la langue, les enfants s’approprient les règles qui régissent (sic) la structure de la phrase, ils apprennent l’ordre habituel des mots en français » (p.12).  Tout cela pour dire qu’en s’exerçant, avec le maître, à parler français, ils se familiarisent avec l’ordre habituel des mots.
« S’approprient », comme « découvrent » est un de ces mots qui paraissent choisis pour ne pas écrire « enseigner, apprendre, connaître, savoir ».
Nous déplorons l’emploi fréquent du mot « manipulation ».
• « Grâce à l’observation d’expressions connues (la date, le titre d’une histoire ou d’une comptine) ou de très courtes phrases, les enfants comprennent que l’écrit est fait d’une succession de mots où chaque mot écrit correspond à un mot oral » (p.13).
Il s’agit d’une approche globale de la lecture : au lieu d’apprendre à lire, on « observe » de l’écrit.
• « L’entrée dans l’écriture s’appuie sur les compétences développées par les activités graphiques (enchaînement de lignes simples, courbes, continues …) mais requiert aussi des compétences particulières de perception des caractéristiques des lettres » (p.14).
L’abus du  mot « compétence » en interdit la compréhension par le lecteur moyen.
•  Est-il vraiment nécessaire d’écrire qu’un enfant va « produire des phrases » ou encore, en grande section, qu’il va « produire un oral compréhensible par autrui » (p.29).
Nous déplorons l’emploi des termes faussement professionnels de production de phrases ou production d’écrit.
• Un dernier exemple de la confusion que peuvent provoquer , volontairement ou non, les termes employés : on trouve dans le synoptique, pour la grande section, l’expression suivante (p.29) :
« s’intéresser aux sens des mots : repérer un mot jamais entendu, essayer de comprendre un mot nouveau en contexte, interroger l’enseignant sur le sens d’un mot ».
Cela décrit un comportement souhaité de la part des élèves et donc que le maître doit encourager.
Mais (p.12) il est question d’activités régulières « d’interprétation de termes inconnus à partir de leur contexte », ce qui autorise le maître à conduire des séances de devinettes, d’essais et d’erreurs, au lieu d’enseigner explicitement des mots nouveaux immédiatement expliqués.
•  Un espoir ténu. Le ministre affirme (p.3) que « l’apprentissage de la lecture ne doit véritablement commencer de façon systématique qu’à partir du CP ». Et en effet les nouveaux programmes de maternelle prescrivent une pédagogie contraire à celle décrite dans le programme de CP. L’inconvénient est que l’abus de départ global en maternelle complique le travail de l’enseignant en CP.
Or, par ailleurs, (p.12), il est dit que le projet d’école est le moyen de garantir la continuité nécessaire entre la grande section et le CP. On peut donc espérer voir des écoles choisir pour la grande section un démarrage alphabétique.

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