Une inspection pédagogique : mai 2002.
Je…fréquente l’école Notre-Dame depuis plus de 40 ans : j’y ai été élève, puis institutrice, puis enseignante, puis professeur des écoles… A part quatre années passées en maternelle en début de carrière, mon unique poste d’enseignement a été le cours préparatoire et il m’arrive encore aujourd’hui d’apprendre à lire aux enfants de mes anciens élèves qui se montrent très heureux de me retrouver. J’ai toujours eu des relations cordiales voire amicales avec mes collègues ainsi qu’avec les parents de mes élèves.
1 – Travail de l’enseignant dans l’école :
A B C Implication dans la mise en œuvre du projet d’école X Implication dans le travail des conseils de cycles, d’école X La collaboration de Mme Catala avec les enseignants du cycle ne semble pas s’inscrire dans un réel travail d’équipe qui serait pourtant bénéfique aux élèves. L’utilisation de méthodes de lecture différentes dans les deux cours préparatoires, le manque d’informations sur les acquis de la grande section montrent un cloisonnement entre les classes et traduisent un relatif manque de concertation… MON COMMENTAIRE : Je n’ai jamais tenu à travailler en équipe. Pour cela, je devrais faire abstraction de mes convictions pédagogiques personnelles confirmées par mon expérience pour appliquer des méthodes autres qu’appliquent certaines de mes collègues : je ne peux , ni ne veux me renier.
… La classe de Mme Catala est spacieuse et largement éclairée. La disposition frontale des tables rend la circulation des enfants problématique et ne laisse pas envisager de travailler en groupe . L’équipement pédagogique est désuet bien que la classe soit dotée d’un ordinateur. Aucune production d’écrit ne figure sur les murs, seules les" images sons" peuvent servir de référentiel. En l’absence d’une BCD dans l’école, le fond de livres qui figurent dans l’étagère bibliothèque demanderait à être enrichi pour pallier la pauvreté de la méthode "Mico" qui sert de support aux apprentissages. L’abonnement à des revues enfantines « j’aime lire, les belles histoires d’Okapi, Toboggan… » permettrait aux enfants de sortir du déchiffrage pour accéder à la lecture. MON COMMENTAIRE : L’espace et l’éclairage la classe répondent aux normes. Je me demande si c’est une inspection pédagogique ou une inspection de travaux publics ! Aurais-je été impliquée, à mon insu dans la construction de la classe ? La disposition frontale des tables permet aux enfants de bien visualiser ce qui est écrit sur le tableau. L »inspectrice et la stagiaire ignorent sans doute que pour écrire et copier ce qui est écrit au tableau, les enfants doivent être de face et que le travail de lecture et d’écriture n’implique pas un travail de groupe contrairement aux activités d’éveil de l’après-midi. Les murs de la classe sont revêtus : – de nombreuses photos d’enfants, – d’œuvres de TOFFOLI, – d’images-sons, – de panneaux de lecture, – de poésies et chants appris, – du damier des nombres de 1 à 100, – des jours de la semaine, etc…. D’aucuns diraient que cette classe est joliment et utilement décorée quand il n’est fait état , dans ce rapport, que d’un équipement pédagogique désuet. Quant à la bibliothèque de classe, elle est suffisamment fournie pour compléter mon cher « MICO » (rebaptisé pauvre Mico !..) qui m’a permis de faire tant de bons lecteurs. Par ailleurs, une très belle bibliothèque existe au sein de l’école, inaugurée par l’inspecteur d’académie de Versailles , il y a quelques petites années.
2 – Observation et analyse des pratiques
Après la récitation de la poésie, sanctionnée par une distribution de bons points, les élèves se rassemblent devant le tableau où la maîtresse présente la graphie du son [wa]. On y associe ensuite les consonnes /b, c ,d, f,/ …./fr, dr/ pour constituer des syllabes. Quelques mots sont donnés par les enfants pour illustrer le son. Des étiquettes sont distribuées (oi-f-b-br-v- ….) et à l’énoncé du son par la maîtresse, les élèves concernés se rassemblent pour constituer la syllabe sous les applaudissements de leur pairs. L’écriture de lignes de /oi/ sur le cahier sera complétée par la copie de trois phrases que la maîtresse écrit au tableau sans majuscule : « le lièvre a soif. il boit dans la mare. il regarde les étoiles. » , relues en chœur par les élèves. La méthode de lecture utilisée présente des textes obsolètes dans les termes utilisés, les situations présentées. À ce jour la majuscule n’est toujours pas introduite. Cette approche doit impérativement être complétée par des albums et des textes documentaires qui permettront de donner une autre représentation de la lecture que celle d’exercices de déchiffrage. Si le passage par la combinatoire est nécessaire, pour permettre à l’élève de produire des écrits, il est dénué de tout intérêt et perd tout son sens s’il constitue une fin en soi. MON COMMENTAIRE J’ai d’abord fait apprendre la poésie aux enfants, qui l’ont récitée et tous ont participé avec plaisir à cette séance. Puis, nous sommes passés à la séance de lecture avec l’étude du son (oi) et j’ai veillé à ce que tous les enfants comprennent et participent. J’ai toujours privilégié la méthode syllabique – et phonétique – pour l’apprentissage de la lecture. C’est pour moi ce qu’il y a de plus logique. J’ai toujours résisté aux méthodes globales, semi-globales et à la lecture par hypothèse de ces dernières années. Il est évident que, pour passer à la lecture courante, il faut connaître : 1. les voyelles 2. les consonnes 3. les sons complexes 4. associer – consonnes et voyelles : m a – consonne et son complexe : m an – son complexe et son complexe : ch ou pour former – des syllabes – des mots – des phrases – de petits textes. À quoi sert à un enfant d’avoir des textes documentaires s’il ne sait pas les lire. Son cerveau non structuré enregistrera des mots qu’il aura essayé de lire, qu’il devinera, mais qu’il ne saura pas écrire et il mémorisera ces mots dans l’écriture des textes qu’il aura lus, d’où quantité innombrable de fautes d’orthographe. Enfin, la dernière partie de la séance a été consacrée à l’écriture. A noter que l’utilisation de la majuscule n’est pas introduite dès le début du CP car les enfants de maternelle écrivent en capitales d’imprimerie – lettres bâton – cela leur est plus facile. La majuscule n’est donc introduite qu’au troisième trimestre de CP, lorsque les enfants possèdent bien l’écriture cursive.
3 – Conclusion et réflexions
Mme Catala officie dans (sic) l’école Notre-Dame depuis 1962. N’ayant suivi aucun stage de formation ni aucun recyclage, sa présence bienveillante auprès des enfants ne suffit plus aujourd’hui à répondre aux exigences d’un enseignement de qualité. En l’occurrence, il s’agit de fonder l’enseignement sur l’activité des élèves et de rompre avec la dérive vers (sic) un enseignement formel et répétitif. MON COMMENTAIRE …. N’ai-je donc tant vécu que pour cette infamie ? Au cours de l’entretien qui a suivi l’inspection, le leitmotiv a été l’obsolescence des méthodes et supports utilisés et je me suis réellement sentie comme une personne prise en fragrant délit d’instruire. Il ne s’en est donc suivi que des remarques négatives puisque ces « pédago-go-gues » n’ont de cesse de vouloir anéantir l’enseignement traditionnel basé sur la rigueur et fondé sur l’étude progressive des matières, enseignement jugé trop « bourgeois » c’est-à-dire trop apte à émanciper le peuple… En conséquence, n’ont de cesse également de vouloir déstabiliser ceux qui pratiquent cet enseignement et quand elles ont débarqué dans ma classe, bardées de cuir et de fer, à leur allure et dans leur regard, j’ai su que ces deux walkyries venaient pour me « descendre en flammes » avec, en guise de lance, leur doctrine pédagogique mortifère de l’éducation fondée sur l’activité des élèves et non plus sur l’apprentissage. En 2002, nous pouvons apprécier les brillants résultats de cet « enseignement ». A noter également qu’au cours de cette inspection, elles n’ont prêté attention aux enfants à aucun moment, préférant pérorer et rire au fond de la classe et n’ont regardé quelques cahiers que parce que je les leur ai montrés. Je n’ai signé le rapport qu’à la condition d’y porter mes commentaires. Abstraction faite du caractère personnel des appréciations portées sur la conduite de ma classe, ce rapport traduit le conflit existant entre deux philosophies du système éducatif : Ecole, lieu d’éducation et d’instruction, ou Ecole, lieu de vie. Si, arrivée au terme de ma carrière, ce rapport n’a aucun risque d’exercer d’impact sur mon enseignement, nous pouvons imaginer la pression exercée sur de jeunes collègues qui n’ont pas d’autre solution que de se soumettre au diktat de cette hiérarchie pédago-go-gique.
Marie-France CATALA Professeur des écoles en cours préparatoire
Ecole Notre dame de Poissy (Yvelines) Novembre 2002
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