Danièle Sallenave  – Ed. Gallimard 2009

La relecture de cet ouvrage, écrit il y a 10 ans, suscite des sentiments forts : l’admiration devant le savoir-faire de l’auteure dans le traitement d’un sujet complexe, la constatation que, depuis 10 ans, presque rien n’a changé, sauf en pire, dans les pratiques quotidiennes de notre enseignement.

La mission confiée à Danièle Sallenave en 2008 était simple et lourde : parrainer les élèves de deux classes de troisième dans l’espoir que la rencontre d’un écrivain les amènerait à aimer la littérature.
Cela, dans un collège de la banlieue de Toulon, classé « ambition réussite » ; collège exclusivement affecté, en fait, à une barre de HLM.
L’auteure y a fait trois courts séjours au printemps 2008. Constatant leur aversion pour la lecture, elle a eu l’idée de les faire écrire, et cela a marché : la moitié environ des élèves a collaboré à la rédaction de dialogues, dont certains ont été joués par eux comme au théâtre.
Danièle Sallenave présente son ouvrage comme un carnet de voyage d’un explorateur, 37 courts chapitres de 3 ou 4 pages, chacun introduit par quelques phrases d’un dialogue écrit par les élèves.
Ce « carnet de voyage », débordant de vie, abonde en observations faites par l’auteur sur « ses » élèves, leur vie au collège et en dehors du collège, leurs parents, leur enfermement imposé par leur communauté, le désespoir affiché et leurs espoirs cachés. Les dialogues qu’ils ont écrits éclairent tout cela.
Au-delà de cette éphémère « ambition réussite » Danièle Sallenave nous livre aussi ses réflexions sur l’état de notre enseignement primaire et secondaire en 2008. Elle manifeste un certain optimisme pour l’avenir, fondé sur les nouveaux programmes du primaire de Xavier Darcos. Elle ne pouvait pas prévoir la suite…

Citations.
« Ce qu’on entend encore trop souvent est que les élèves s’ennuient et sont en situation d’échec parce que le système scolaire est resté trop archaïque. En somme, parce qu’il y a encore trop d’école à l’école ».
« Il y a un mot qui revient tout le temps : « absentéisme ». On a toujours besoin d’un mot abstrait quand les choses prennent des proportions qu’on ne peut plus nier »
« Ils ne lisent pas, ils ne lisent pas assez ». Des livres, ce n’est pas ce qui manque, il y en a partout… et tout un édifice complexe et ingénieux pour en favoriser l’accès (…). Depuis une vingtaine d’années, c’est énorme ce qu’on a déboursé en France pour la création, l’entretien, la rénovation des « lieux de lecture »
« S’ils ne lisent pas, c’est enfin parce qu’ils n’ont pas, et c’est vrai pour beaucoup d’adolescents, une pratique suffisamment fluide, rapide, aisée, de la lecture ».

Danièle Sallenave, membre de l’Académie française, préside l’association SILENCE ON LIT ; créée par Olivier Delahaye, cinéaste, sur une idée qu’il a rapportée d’un lycée francophone d’Ankara. Dans ce lycée, tous les jours, à heure fixe, une sonnerie donne le départ de 15 minutes de silence : tout le monde, élèves, enseignants, direction, personnel de service, lit un livre de son choix.
De plus en plus d’établissements français adoptent  cette démarche (en janvier 2018, environ 10 demandes par jour à l’association).

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