Lignes d’action
En effet, si la refondation échouait, l’ampleur du désastre retirerait tout intérêt à la notion même de soutien scolaire.
On le sait, la refondation prendra de nombreuses années. Si elle aboutit, une cause majeure des difficultés scolaires aura disparu : les difficultés causées par l’enseignement lui-même, et en particulier les retards scolaires massifs. Le nombre d’élèves ayant besoin d’un soutien important aura diminué dans de très fortes proportions, et l’on pourra construire des solutions raisonnables.
Avant d’en arriver là, nous devons gérer une longue période de transition, qui normalement devrait voir décroître régulièrement le besoin de soutien, jusqu’à se stabiliser à un niveau acceptable qui se maintiendra à l’avenir.
Après le rappel des conditions optimales de la refondation de l’école, nous présentons donc deux préconisations :
– l’une concernant la période de transition, c’est-à-dire les dispositions à prendre pour les élèves ayant un important retard, du fait de la piètre qualité de l’enseignement reçu ;
– l’autre pour tous les autres cas d’élèves en difficulté ; il s’agit de mesures évolutives qui se prolongeront après la période de transition.
Conditions optimales
Les conditions suivantes sont de nature à accroître très fortement l’efficacité des opérations d’accompagnement et de soutien :
1 – Réaffirmation de l’impératif de transmission du savoir, par un enseignement explicite, systématique, progressif et répétitif ; ces principes, qui s’appliqueront progressivement à l’ensemble du système d’enseignement au cours de la période de transition, devraient être imposés dès le départ à toutes les actions d’accompagnement et de soutien.
2 – Réaffirmation de l’existence d’un savoir universel à transmettre. Restauration de l’autorité des enseignants et de l’école. Instauration de mesures efficaces à l’encontre des parents qui ne la respecteraient pas.
Ces dispositions redonneraient aux enseignants une légitimité plus grande vis-à-vis des parents d’enfants en difficulté, alors même qu’aujourd’hui la confiance est souvent rompue.
3 – Affirmation et restauration de la collaboration entre parents et enseignants au sujet de l’instruction des enfants de chaque famille (et non pas de l’instruction de tous les enfants ni a fortiori du fonctionnement des établissements).
Cette collaboration existait jadis.
A ce titre, développement des dispositions prises pour que les parents soient correctement informés du niveau effectif des connaissances de leurs enfants (*) .
On peut aussi envisager de dispenser aux parents un complément de formation ; des expériences ont été faites en ce sens.
Voir Annexe 3.
* Les parents qui font confiance à l’EN et laissent faire n’iraient pas involontairement contre l’intérêt de leurs enfants, comme c’est le cas actuellement parce que l’EN leur ment sur le savoir réel et les progrès réels des élèves ; bien informés, la plupart réagiraient en cas de difficulté scolaire.
Il est raisonnable de penser que, du fait de l’autorité restaurée et réaffirmée du savoir, une certaine proportion de parents qui actuellement sont hostiles à l’école pour des raisons culturelles ou autres, reviendrait à un comportement normal, et ce, d’autant plus que des relations de collaboration confiante se seraient établies dès la maternelle.
Il resterait à coup sûr des parents au comportement négatif, mais ils auraient moins d’influence sur des élèves véritablement intéressés par le travail scolaire.
Période de transition
Les élèves en grande difficulté et en grand retard sont partout dans le système d’enseignement :
– élèves de CE1 qui ne savent pas déchiffrer
– élèves de 6ème qui ne maîtrisent pas la lecture, l’écriture et le calcul élémentaire
– élèves de 6ème qui sont très au-dessous du niveau de CM2 défini par les programmes
– élèves de 15 ans qui ne maîtrisent pas la lecture l’écriture et le calcul
– élèves de 15 ans qui sont très au-dessous du niveau de la 3ème
– etc…
Pour ces élèves, nous proposons une mesure « révolutionnaire » : renoncer aux classes d’âge et leur fournir l’enseignement dont ils ont besoin, sachant que l’on ne peut pas enseigner les mêmes notions de la même façon à des élèves de 8, 12 ou 15 ans.
Objectifs
– Permettre au plus grand nombre d’atteindre le plus vite possible le niveau de leurs classe d’âge français et en maths. Par cela même, leur donner ou leur rendre le goût du travail et des études.
Leur permettre ainsi de rejoindre ces classes au bout d’un an, 2 ans ou 3 ans, quitte à y bénéficier d’un soutien dans les disciplines autres que le français et les mathématiques
– Libérer ainsi pendant la période de rattrapage les classes qu’ils auraient fréquentées dans le régime actuel, pour le plus grand bénéfice d’eux-mêmes, des autres élèves, et des enseignants.
Dispositions
1 – Limiter l’enseignement de rattrapage au français et aux mathématiques, en leur consacrant des horaires importants.
L’horaire disponible serait employé au mieux ; les enfants les plus démotivés suivraient des enseignements actifs dans des matières non académiques (activités artistiques, manuelles, sportives, etc…), enseignements eux-mêmes méthodiques et structurés.
2 – Former dans tous les établissements où c’est nécessaire des classes ou groupes de niveau dans ces deux disciplines avec des enfants ou des adolescents appartenant aux mêmes tranches d’âge.
Moyens
Il semble préférable que les enseignants des classes de rattrapage soient volontaires, et qu’ils disposent d’un moyen pour échanger leurs expériences.
Remarque
Pour ces élèves, l’objectif est de réaliser des progrès par rapport à la situation actuelle, où ils sont souvent abandonnés à eux-mêmes. L’objectif n’est pas d’amener chacun au niveau d’instruction le plus élevé permis par ses aptitudes et motivations. En effet, pendant la période de transition, cet objectif exigerait des moyens tels qu’en pratique il est hors de portée.
Mesures pérennes, à généraliser d’urgence
Dans la mesure où l’aide des parents joue un rôle très important, il est nécessaire que l’Education Nationale propose des études surveillées ou autres, lorsque les parents n’ont pas la capacité d’assumer ce suivi. Le recours aux associations et aux bénévoles est certainement possible, particulièrement dans le primaire, avec l’aide des municipalités. L’équivalent est possible aussi dans les collèges.
Le rôle des établissements ne serait pas de contrôler étroitement les intervenants, mais de s’assurer que tous les élèves bénéficient d’une aide de type familial, en intervenant auprès des parents dans le cas contraire.
• Classes de niveau
On a vu pourquoi les classes de niveau diminuent le nombre d’élèves en difficulté et donc le recours à un dispositif annexe de soutien.
Nous proposons de créer dans chaque établissement plusieurs classes de niveau par classe d’âge, le nombre de niveaux variant avec l’effectif de l’établissement.
Cette mesure facilite grandement le travail des enseignants, qui ont des classes plus homogènes.
Le danger est la constitution de filières, les élèves restant définitivement classés au même niveau. Pour y remédier, il faut adopter un objectif de mobilité, en fin d’année voire en cours d’année. Sur une année, les enseignants et l’établissement s’imposeraient une mobilité minimale pour la moitié des élèves par exemple.
NB. Les niveaux les plus faibles devraient être pris en charge par des enseignants spécialisés.
• Assistance et dépannage
Pour les élèves qui suivent normalement et qui à un moment donné, "décrochent" dans une discipline, des moyens d’assistance immédiate doivent être mise en place.
La solution la meilleure, lorsqu’elle est applicable localement, est l’existence d’enseignants spécialisés capables de reprendre des élèves séparément ou en petit groupe, pour une intervention de rattrapage de courte durée.
• Maternelles
La mise en place de moyens permettant de prendre en charge efficacement les enfants non francophones et mauvais francophones diminuerait significativement les échecs en CP.
• Nous avons précédemment évoqué le cas des handicaps lourds.
Remarque : le redoublement
Autrefois, le principal remède contre les difficultés scolaires était le redoublement.
Aujourd’hui, le redoublement n’a plus la faveur des spécialistes. Certains experts ont même "démontré" statistiquement que le redoublement ne servait à rien.
Les raisonnements tranchants sont rarement justes. Il semble assez évident que, dans certaines situations, selon les causes des difficultés, selon les élèves, et selon les enseignants, le redoublement peut être utile ou inutile.
Les mesures que nous préconisons auraient à coup sûr pour effet de diminuer fortement l’échec scolaire et donc le besoin de soutien. Mais cela n’implique pas la disparition a priori du redoublement. C’est l’expérience qui tranchera.