Le pacte pour la refondation de l’école
Les initiateurs et auteurs de l’Appel pour la refondation de l’école : Laurent Lafforgue, Marc Le Bris, Jean-Pierre Demailly, Michel Delord, Frédéric Guillaud, proposent, en termes clairs, précis, pratiques, cinq mesures pour que l’école primaire française redevienne ce qu’elle fut jadis : la meilleure du monde.
1. Retrouver les fondements de l’École primaire
1 – Retrouver les fondements de l’École primaire
• Affirmer les principes suivants :
• Les connaissances fondamentales doivent être enseignées de manière systématique et prioritaire (horaires prioritaires).
• L’élève ne construit pas tout seul son savoir; le maître doit le lui transmettre
• La découverte aléatoire et l’observation ne permettent pas l’assimilation sûre et définitive des savoirs fondamentaux
• L’autorité du maître n’est pas un acte de violence, mais la condition d’émancipation des capacités rationnelles chez l’enfant
2 – Refaire des programmes clairs
Principes :
Les programmes scolaires sont le document par lequel la Nation définit les connaissances que ses enfants doivent maîtriser pour accéder à l’autonomie intellectuelle. Les querelles méthodologiques ne doivent y avoir aucune place. Il doit donc s’agir d’un document clair et concis, compréhensible par tous. Les programmes scolaires ne doivent mentionner que des contenus, c’est-à-dire : les connaissances qui doivent être acquises et maîtrisées à l’issue de l’Ecole primaire. Les programmes ne sont pas le lieu de considérations dissertatives.
Le but premier de l’enseignement primaire est la maîtrise de la langue, en particulier écrite, et de l’arithmétique appliquée à la résolution de problèmes simples. Vouloir y enseigner de manière prématurée et massive la littérature et les mathématiques, avant la connaissance du code alphabétique et des 4 opérations, est non seulement irréalisable mais n’a qu’une conséquence prévisible et déjà vérifiée : rendre impossible l’enseignement des mathématiques et de la littérature lorsque l’élève atteint l’âge où cet enseignement est souhaitable et possible.
D’une manière générale, le programme de l’Ecole primaire doit comprendre des connaissances élémentaires qui, si elles ne sont pas acquises à un âge donné, sont plus difficiles à acquérir par la suite. Aujourd’hui, l’échec scolaire dans le secondaire et à l’université s’explique en grande partie par l’accumulation des non-maîtrises, qui empêchent l’acquisition par l’élève d’une culture générale humaniste et scientifique, fonction centrale de l’enseignement secondaire.
3 – Former les maîtres
Principes :
Il importe en particulier que les futurs maîtres aient reçu une formation en français et en mathématiques d’une grande solidité. Un maître ou une maîtresse fragile en orthographe, en grammaire ou en arithmétique ne peut pas remplir correctement sa mission. Compte tenu de ces exigences, il importe de réformer complètement les IUFM.
Mesures :
• Créer des licences pluridisciplinaires Lettres/Sciences/Langues vivantes, dites « Licences d’enseignement primaire », destinées en particulier aux aspirants au concours de professeur des écoles ;
o Centrer les épreuves d’entrée à l’IUFM sur les connaissances fondamentales que les maîtres doivent transmettre ;
o Repenser les enseignements :• renforcer l’enseignement des disciplines (cours magistraux donnés par des universitaires);
• confier l’enseignement de la didactique des différentes disciplines à des instituteurs et professeurs des écoles issus récemment des classes et destinés à y retourner.
• faire une grande place à la pratique pédagogique effective en alternance (deux stages en « pratique accompagnée », un stage en « responsabilité »)
• en psychologie de l’enfant, histoire et philosophie de l’éducation, histoire des techniques d’apprentissage, développer un enseignement pluraliste des doctrines (par des universitaires) ;Centrer les épreuves écrites du concours de professeur des écoles sur les connaissances fondamentales, et pas sur la vérification de l’orthodoxie pédagogique (actuellement, le Français et les mathématiques ne pèsent, chacun, que pour 21,43% du total)- Renforcer les coefficients ; augmenter les exigences ;
Réviser la procédure de titularisation : prononcer la titularisation au terme de la première année d’enseignement, au vu des résultats relatifs atteints par les élèves, de l’avis du directeur d’école et de l’inspecteur d’académie chargé du suivi.
4 – Libérer et évaluer les maîtres.
Les maîtres sont des fonctionnaires de l’Etat. Ils sont tenus d’appliquer les programmes. Ils doivent être évalués sur leurs capacités à transmettre efficacement à leurs élèves les savoirs prévus par les programmes. Les programmes ne comportant que des contenus, les maîtres ne sauraient être évalués sur leurs méthodes, mais uniquement sur leurs résultats (relativement aux spécificités de leurs classes, cela va de soi). Dans les limites de la loi, la liberté pédagogique doit donc être totale. Elle ne se conçoit pas sans une information complète et pluraliste sur la diversité des méthodes pédagogiques, reçue à l’IUFM. L’expérience du maître a ensuite la primauté sur toutes les doctrines constituées.
• Revoir les critères d’évaluation des maîtres par les inspecteurs ; les critiques ne doivent porter que sur la qualité de la performance pédagogique personnelle (avec un jugement relatif aux caractéristiques particulières de la classe) et sur les performances des élèves ; les inspections peuvent faire usage de tests à chaud portant sur la totalité de l’effectif et doivent s’interdire toute dépendance vis à vis des modes pédagogiques éphémères.
• Constituer un corps d’inspecteurs issus des enseignants du niveau correspondant, et ayant au moins 15 ans d’expérience professionnelle, sélectionnés sur la base de leur compétence disciplinaire et de leur performance formative reconnue, sur contrats renouvelables (choix par des commissions ad hoc). Une autre solution serait que les inspecteurs exercent en tant que tels seulement à temps partiel.
• Revoir les conditions d’accès aux corps d’inspection
5 – Rétablir les exigences du savoir
Principes :
• redonner à l’équipe enseignante la responsabilité exclusive de déterminer le redoublement des élèves à partir des choix que ceux-ci ont exprimés.
• créer des commissions de recours formées d’enseignants distincts de l’équipe enseignante
• instaurer une évaluation en fin de CP, vérifiant la maîtrise de la lecture, condition du passage en CE1
• instaurer un examen de passage en sixième, comportant dictée, questions de grammaire, petite rédaction, problème et questions d’arithmétique
• créer un cours de rattrapage pour ceux qui ont échoué à l’examen de passage en 6ème. Le but de ce cours serait d’atteindre en deux ans le niveau de fin de sixième. A l’issue de ces deux années, les élèves passeraient un nouvel examen, qui leur permettrait d’entrer en 5ème. Pour ceux qui échoueraient une nouvelle fois, un nouveau cours de rattrapage serait ouvert, avec examen d’entrée en 4ème. Pour ceux qui échoueraient une troisième fois, une orientation vers l’apprentissage serait prévue.Évaluation nationale :
L’évaluation des performances du système éducatif, et singulièrement des acquis des élèves à la sortie de l’école primaire, doit être confiée à un organisme indépendant de l’administration. Le seul critère qui vaille est une mesure précise de la quantité et de la qualité des connaissances acquises, rapportées aux exigences des programmes.