Le monde qu’on leur prépare.

Luc Chatel – Jean-Pierre Chevènement
Entretiens dirigés par Nicolas Beytout
Ed. Plon – 2011

Pourquoi présenter ce livre ? Parce que, après des chapitres consacrés à l’économie et au social en France et dans le monde, une très large place y est faite à l’école. Et aussi, à cause de la liberté de parole de Jean-Pierre Chevènement, qui fut ministre de l’Éducation nationale entre 1984 et 1986.
Les propos de Luc Chatel sont moins surprenants, peut-être parce que plus contraints. Il est vrai aussi que, depuis juin 2009, il ne laisse pas passer une semaine sans nous annoncer du nouveau à l’Éducation nationale.

Nous ne sommes évidemment pas d’accord avec toutes les idées de Jean-Pierre Chevènement, et, en particulier avec l’idée de rendre obligatoire la scolarité à partir de trois ans. Avant de rendre obligatoire la maternelle-et d’y pratiquer des évaluations-commençons par la repenser, en améliorant la coordination GS-CP et la formation des maîtresses. Alors le succès rendra sans doute inutile le sacrifice d’une tradition hautement louable, qui veut que les mères et grands-mères qui le peuvent élèvent elles-mêmes les petits enfants.
Cela -et quelques autres points de vues- étant mis à part, nous trouvons en Jean-Pierre Chevènement un défenseur convaincu des valeurs que nous défendons nous-mêmes et qu’il considère comme fondatrices de l’école… les valeurs de la connaissance, les valeurs de l’effort, et les valeurs de l’autorité professorale… qui tient essentiellement au fait que l’on respecte le savoir.
– L’école est d’abord le lieu où se délivre la connaissance…
– On n’a jamais rien appris sans travailler .

Jean-Pierre Chevènement constate l’échec patent de notre système d’enseignement, du cours préparatoire à la sortie du collège, la débâcle dont nous voyons qu’elle s’accélère :
(À propos d’une enquête du ministère sur la période 2003-2009) :  les résultats sont en baisse…d’une manière qui est très nette, assez catastrophique même… Le système donne des résultats satisfaisants ou très satisfaisants pour 50 % des élèves…  50 % posent problème
 La clé, c’est l’idéologie… Je pense qu’il faut en finir avec le pédagogisme, ensemble des dérives auxquelles a conduit l’hégémonie des pédagogies dites constructivistes. Je crois que seule une pédagogie structurée peut venir à bout des difficultés des enfants, et cela dès le départ. (c’est nous qui soulignons) 
Une formule percutante :  la méthode globale est efficace quand le problème est résolu… Et un constat : la complaisance du ministère vis-à-vis du pédagogisme ne se relâche pas.

Enfin, Luc Chatel affiche le credo à la mode : la mise en place dans chaque classe d’une pédagogie différenciée, consistant à traiter les énormes écarts dans le savoir qui résultent de l’abandon des valeurs fondatrices, en demandant aux professeurs d’enseigner différemment les mêmes notions à tous leurs élèves, des décrocheurs aux mieux instruits. Nouvelle panacée, nouvelle utopie, à laquelle Jean-Pierre Chevènement réplique en réclamant la constitution de groupes de niveaux, « mais des groupes changeants ».
 Un personnage attachant, un livre … instructif !

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