Le Haut Conseil de l’Education dévoile une évidence et noie le poisson
Rapport du 27 août 2007 : Bilan des résultats de l’Ecole – 2007 – L’école primaire
Extrait du sommaire du rapport :
60 % obtiennent des résultats acceptables ou satisfaisants
25 % ont des acquis fragiles
15 % connaissent des difficultés sévères ou très sévères
2 – Les difficultés, identifiées dès le début de la scolarité, s’aggravent avec le temps
Le niveau à l’entrée au CP pèse très fortement sur les chances d’un cursus scolaire régulier
Le problème s’amplifie tout au long du parcours scolaire
…
Le texte intégral du rapport se trouve sur le site www.hce.education.fr rubrique avis et rapports
Nos commentaires
– I –
Le HCE crée une sensation médiatique en « révélant » ce que tout le monde devrait savoir depuis longtemps : 40 % des élèves quittent le primaire sans savoir correctement lire, écrire et compter, sans comprendre le texte écrit d’une question.
Le rapport nous rappelle que la chose était connue depuis 15 ans.
Pour notre part, nous évoquons depuis plusieurs années le chiffre de 200.000 enfants massacrés chaque année. Ce serait donc plus de 300.000, selon le HCE.
Et, en effet, c’est certainement parmi ces 300.000 enfants inaptes à suivre un enseignement secondaire que se trouvent les 200.000 qui, chaque année, sortent sans diplôme du système éducatif.
Ce que ne dit pas le rapport, c’est que le phénomène s’aggrave rapidement. Entre 1980 et 2000, ce sont les enseignants du secondaire qui essayaient d’alerter l’opinion sur le véritable niveau de leurs élèves. Depuis quelques années, les enseignants du supérieur constatant une dégradation constante du niveau des nouveaux étudiants. Ils soulignent que les lacunes les plus graves ont pour origine l’enseignement primaire.
Le rapport compare ces 40 % d’échecs à un ordre de grandeur de 5 % en Suède et aux Pays-Bas. En effet, 5 à 10 % nous semble un objectif réaliste, mais sous la condition d’une rénovation complète de l’enseignement primaire, dans l’esprit du PACTE POUR LA REFONDATION DE L’ECOLE.
– II –
Si le HCE s’était borné à ce constat, il aurait rendu à la collectivité nationale un service éminent, car c’est la première fois qu’un organe officiel met globalement en cause l’enseignement primaire, d’où un retentissement médiatique important, dans une opinion déjà sensibilisée par les diverses déclarations de Gilles de Robien.
Ceux qui dénoncent depuis des années la situation catastrophique de l’enseignement primaire, dont nous sommes, avec bien d’autres plus qualifiés que nous, se sont heurtés d’abord au mur de silence et à l’auto-censure des médias, ensuite à la négation pure et simple, sous l’égide des « sciences de l’éducation », puis aux tentatives d’amalgame avec la « pédagogie intégrative », enfin aux injures et, pour les instituteurs résistants, aux menaces et aux sanctions.
-III-
Mais le HCE a voulu traiter des causes et des remèdes.
Sur ces sujets, le rapport est sans grand intérêt, car ses auteurs n’ont pas vu, ou pas voulu voir, que des causes fondamentales sont à l’œuvre, et tout d’abord :
– des causes doctrinales : la priorité n’est pas donnée à la transmission du savoir : l’élève doit « construire lui-même son savoir »
– les graves lacunes et incohérences des programmes officiels.
Ainsi le rapport est-il fondé, pour l’essentiel, sur le statu quo des pratiques, ou sur le statut quo des directives officielles, qui ne seraient pas suffisamment respectées (alors que nous les considérons comme largement contestables).
Nous nous limiterons à l’examen de deux des questions évoquées dans le rapport :
– la persistance pendant tout le cursus scolaire des difficultés constatées en CP
– le redoublement
– IV –
« Les élèves qui sont en difficulté dès leur entrée en CP le sont toujours, dans leur quasi-totalité, par la suite : l’école élémentaire ne permet pas, en général, de réduire les difficultés repérées au début de la scolarité obligatoire ».
Quels élèves ne sont pas en difficulté au début du CP ?
Pour l’essentiel, et selon les termes mêmes du rapport, ce sont les 60 % qui apprennent quelque chose à l’école primaire et qui réussissent – selon les normes actuelles – leur parcours secondaire.
D’après nous, et très approximativement, ces 60 % se répartissent entre :
– 30 % largement instruits et aidés par leurs parents, chiffre que l’on peut déduire des ventes « para scolaires » de manuels syllabiques
– 30 % suffisamment ouverts, souples et flegmatiques pour surnager dans la soupe pédagogique (où les 40 % restant font naufrage).
Les auteurs du rapport se bornent à constater que l’école ne permet pas de réduire les difficultés, alors qu’en vérité l’école actuelle aggrave les difficultés des plus faibles, comme le prouvent d’innombrables témoignages.
Par ailleurs, le rapport souligne à juste titre les insuffisances de la maternelle pour ce qui est de l’expression orale ; pour y remédier, il faudrait faire passer au second plan la « socialisation » des enfants, et instaurer, dès la maternelle, par une véritable discrimination positive, un enseignement spécial pour les enfants qui s’expriment mal en français, du fait de leur entourage familial et social.
– V –
« Le redoublement est inefficace et contraire à l’égalité des chances »
Les auteurs donnent l’impression d’avoir découvert la cause première de l’échec massif de l’enseignement primaire.
Ils se basent sur des considérations statistiques, qui prouveraient que le redoublement ne permet pas le rattrapage que l’on en attend. D’autre part les élèves « promus de justesse » en CE1 réussiraient mieux que les redoublants en CP.
Cela étant, comme, d’après le rapport, moins de 20 % des élèves redoublent une classe du primaire, cela ne saurait expliquer 40 % d’échecs.
Il est bien certain qu’on ne peut pas attendre grand-chose du redoublement d’une classe, où, quelle que soit la bonne volonté du maître, les programmes aberrants et les principes pédagogiques utopiques font que l’on y instruit peu et mal.
Dans l’état actuel des choses, la majorité des élèves qui redoublent, comme de ceux qui « bénéficient » de « remédiations » diverses, est en difficulté non pas pour des raisons personnelles, mais par suite de la maltraitance pédagogique généralisée.
L’expérience du SLECC le prouve : lorsqu’on reviendra à un enseignement raisonnable, la proportion des élèves en difficulté diminuera de façon spectaculaire. Alors il sera possible de réfléchir utilement au choix entre le redoublement et un soutien efficace immédiat.
Dans l’intérêt des élèves en difficulté comme des élèves de la classe supérieure, on évitera ainsi le passage d’enfants dont les connaissances et les progrès sont manifestement insuffisants.