A l’opposé, des voix de plus en plus nombreuses laissent entendre que la liberté de scolariser ses enfants en dehors du service public, et des établissements privés sous contrat qu’ils assimilent au service public, est très réduite. Les parents le déplorent, en particulier ceux qui ont de faibles ressources, comme l’atteste un sondage récent.
Pourtant, sur le site du ministère, on peut lire ceci : "En France, le service public d’enseignement coexiste avec des établissements privés, soumis au contrôle de l’État et pouvant bénéficier de son aide – en contrepartie d’un contrat signé avec l’État. La liberté d’organiser et de dispenser un enseignement est une manifestation de la liberté d’expression : elle est définie par la « loi Debré » n°59-1557 du 31 décembre 1959 sur la liberté de l’enseignement et les rapports avec l’enseignement privé."
Il y a donc un cadre légal qui permet le développement d’établissements privés, et une liberté officielle. Mais, se lancer dans une telle aventure est plus que risqué financièrement. Sauf à demander aux parents de payer des frais de scolarité importants, excluant de fait ceux qui ne peuvent pas payer. Malgré le développement de systèmes de bourse, scolariser son enfant dans un établissement privé indépendant est bien souvent un luxe.
Il n’y aura de liberté que le jour où le financement des établissements scolaires ne sera plus versé à l’établissement, mais attaché à l’élève sous une forme ou une autre. Un tel système créerait une révolution et faciliterait la création d’écoles indépendantes. La Suède, connue pour son modèle social, a mis en place le chèque éducation en 1992 et ne le regrette pas.
Une telle décision n’aurait pas d’incidence sur les finances publiques, mais transformerait en profondeur le système éducatif. En mieux ou en pire ? C’est là la question qu’il faut se poser car elle n’est pas simple, et la réussite de nombreux élèves en dépend.
Par rapport aux écoles publiques, on peut imaginer aisément qu’un tel système de financement accélérerait le départ des élèves vers des établissements privés, surtout si ceux-ci sont plus proches du domicile ou d’un meilleur niveau, ou encore s’ils développent une pédagogie alternative qui prenne mieux en compte les spécificités de son enfant. En même temps, cela mettrait fin à ce système de quota d’élèves qui est exigé pour ouvrir ou fermer des classes, sans tenir compte des particularités locales : libre aux chefs d’établissement d’ouvrir le nombre de classe nécessaires, quitte à chercher des financements complémentaires pour faire tourner des classes en sous-effectif.
Une gestion du système moins centralisée, un recrutement des enseignants plus local et plus libre, une liberté de choix pour les enseignants eux-mêmes, sont des pistes qui pourraient insuffler un peu d’oxygène au système éducatif.
Libéraliser l’enseignement ne produirait pas nécessairement la fin d’un service public de qualité. Il est même permis de penser le contraire. La grande crainte est de voir se développer une très grande diversité de niveaux entre les établissements. Mais, qui oserait affirmer aujourd’hui que les établissements publics sont tous de même niveau, que la formation délivrée dans un lycée ambition réussite de la Seine Saint Denis est du même niveau que celle du Lycée Louis le Grand ?
La Fondation pour l’école a organisé un colloque sur le sujet au Sénat le 2 juin 2010, auquel nous avons assisté. Les interventions ont toutes été filmées et vous pourrez les retrouver à cette adresse. Ce sont des éclairages intéressants qui peuvent alimenter la réflexion.
Nous vivons dans un pays qui aime la liberté, au point de l’avoir inscrite dans sa devise. Mais la liberté représente toujours un risque, avec des conséquences imprévisibles. La liberté laisse de la place à l’initiative et le comportement d’acteurs libres est difficilement prévisible. Faire le choix de la liberté, c’est plonger dans l’inconnu et il est certain que nous n’y sommes pas tous prêts. Faut-il pour autant la rejeter par principe ? Ne gagnerions-nous pas à faire davantage confiance aux personnes et un peu moins à un système kafkaïen ?
Et vous, qu’en pensez-vous ? N’hésitez pas à laisser un commentaire à l’issue de cet article.